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Un tailleur pour dames

On ne prévoyait pas de rencontrer Georges Lini sur ce terrain-là. Et du coup, on pouvait s’attendre … à tout, sauf à la reconstitution historique d’un salon bourgeois parisien sous la Troisième République. "Faire résonner au présent les œuvres classiques, en renouveler la perception, en faire surgir des réponses neuves et imprévisibles", tel est le credo du metteur en scène. Certes, une pièce de Feydeau est d’abord une formidable mécanique aux rouages parfaitement huilés et qui a pour but premier de susciter le rire, avec ses trucs et ficelles : quiproquos, adultères en pagaille, rencontres inattendues … et mensonges. Des mensonges loufoques, énormes, presque surréalistes. Ils s’additionnent, se superposent, s’emboîtent à un rythme de plus en plus effréné qui contamine aussi les mouvements, de plus en plus rapides et saccadés. Dans les mises en scène traditionnelles de Feydeau, les portes claquent. 

L’idée géniale ici est d’avoir transformé les portes en trappes. A chaque apparition, les personnages surgissent du sol comme des automates. Le plateau s’inclinant de plus en plus au fur et à mesure, sauver les apparences à tout prix devient aussi un exploit sportif où l’on s’agrippe, se démène et s’affale. Les mots ont perdu toute vraisemblance et ne révèlent que le vide. La pièce nous apparaît finalement comme une sorte de "cauchemar gai" qui montre du doigt une bourgeoisie décadente et "des personnages/cobayes en souffrance, sortes d’animaux de laboratoire livrés aux rires des spectateurs". Georges Lini orchestre magistralement cette folle aventure, grâce aussi à une équipe parfaitement soudée de huit comédiens épatants, bien rodés à la comédie mais qui ne versent jamais dans la caricature.
D.M.


Un tailleur pour dames de Georges Feydeau. Mise en scène de Georges Lini. 

Créé à l’Atelier Théâtre Jean Vilar. Coproduction Théâtre Royal du Parc/Atelier Théâtre Jean Vilar/Compagnie Belle de Nuit.

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