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Hélène Theunissen

© Dominique Bréda

Dans un seul en scène radieux, Hélène Theunissen lève le voile sur une réalité rarement abordée au théâtre (ou ailleurs) : le désir féminin après 60 ans. Accompagnée à l’écriture par Geneviève Damas, elle dessine sans fard et avec tendresse le corps et la vie d’une femme ridée mais pas bridée. Elle y incarne Marie Couturier, 64 ans. Séparée, mère d’une fille qui a la trentaine, Marie travaille comme « nez » pour une grande marque de parfum. Les fragrances, ça la connaît : les notes de tête comme le muguet, le jasmin, la fleur d’oranger, des arômes plus sucrés comme la vanille ou des nuances plus fortes comme le cèdre. Mais les effluves qu’elle vient frotter à nos sens ont des saveurs plus âcres, comme l’odeur de sa mère dont elle assume la charge, cette femme diminuée par Alzheimer, exsudant les toxines suscitées par les médicaments. Mais aussi l’eau de toilette boisée d’Alexis, ce jeune homme avec qui elle doit collaborer pour créer un nouveau parfum et qui, en la draguant, va troubler le statu quo sexuel dans lequel elle s’est enfermée. 

Captée par la caméra de Gaspard Audouin, Hélène Theunisssen soumet ainsi son jeu, son corps, au regard d’un jeune homme qui suit ses déambulations, zoome sur ses gestes, son allure, un bout de peau. La caméra devient ainsi miroir. A la fois, le miroir littéral, celui dans lequel Marie rechigne tant à se voir vieillir. Mais aussi le miroir métaphorique et affligeant que tend la société aux femmes de plus de 60 ans. Des femmes qui, passé un certain âge, ne sont plus regardées comme des femmes mais comme des mères ou des grands-mères, quand elles ne deviennent pas carrément invisibles. Dans Perfect Day, la vieillesse n’est plus un naufrage mais devient plutôt paysage, un paysage qui, au soleil couchant, révèle d’autres couleurs, d’autres reliefs, d’autres possibles. C.M.

Hélène Theunissen dans

Perfect Day de Geneviève Damas, mis en scène par Lara Ceulemans, créé au Théâtre Blocry, Louvain-la-Neuve.

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